Histoire de corps

Juil 19, 2019 | Textes

«Avant que la puberté me frappe de plein fouet, je ne me sentais ni femme ni homme. Dans ce temps-là, je n’avais aucune idée de l’existence du terme « non binaire » (je ne sais même pas s’il existait déjà). Lors d’un sleepover avec une amie, j’ai vu un soutien-gorge dans ses bagages et j’ai pensé: « C’est vrai, ma mère en porte une aussi, mais elle est nettement plus grande! » C’est là que j’ai réalisé que j’allais devoir en porter un jour, moi aussi. Je n’étais pas très chaude à l’idée, mais je savais que c’était une nécessité comme je faisais beaucoup de sport. 

Lorsque ma poitrine a commencé à se développer, je pratiquais la gymnastique artistique. C’est normal pour les gymnastes d’avoir de petits seins, puisque ce sport exigeant ralentit la croissance du corps. Sauf que ça n’a pas été mon cas. À 15-16 ans, je portais du 34D. Pour une personne ne s’identifiant à aucun genre, dans ma tête, j’étais mal partie. 

C’est là que j’ai commencé à me faire niaiser. « Haha! Les seins, c’est de la graisse. T’es grosse! » Je suis grosse?! OK… il faut que je cache ça.

Arrivée des gros t-shirts amples, refus des camisoles ajustées et rejet catégorique des robes qui montreraient mes formes féminines. Je me cachais sous des montagnes de chandails foncés et peu flatteurs. J’avais une phobie de me faire dire que j’étais belle, et même du contraire, que j’étais laide et grosse. Je voulais juste être cette personne gentille et intelligente qui passe complètement inaperçue. J’ai misé sur mon cerveau et ma personnalité et je me foutais complètement de mon apparence.

Malheureusement, je manquais énormément de confiance en moi. Je n’aimais pas mon corps. Il était laid et disproportionné. Magasiner me déprimait, car ma poitrine m’obligeait à porter une plus grande taille que ce qui convenait au reste de mon corps. Rien ne rendait justice à mon corps. J’ai abandonné ma quête d’une garde-robe parfaite.

Quand j’ai arrêté la gymnastique, je croyais que j’allais perdre des seins. Faux… ma taille est passée à 34DDD! De peur qu’on flirte avec moi, j’ai continué à me cacher sous mes vêtements. Le pire, c’est qu’en raison des stéréotypes présentés dans les publicités, je croyais que je devais être une femme avec des cheveux longs et des courbes exceptionnelles, alors que ça me rendait mal à l’aise. 

Quelques années plus tard, j’ai décidé d’être plus audacieuse et de porter la robe ajustée de ma sœur. Une belle robe aux rayures bleues et blanches. Je n’aurais jamais cru que le mot « sexy » ferait partie du vocabulaire employé pour décrire ma personne, mais les commentaires positifs ne se sont pas fait attendre. 

Ah bon… Je ne suis pas grosse? Je suis belle? Je suis sexy?! 

J’ai un peu perdu le cap et j’ai commencé à m’habiller de façon plus féminine. Les collants, les shorts, les camisoles… Je voulais recevoir des commentaires sur mon corps. Regardez-moi! Aimez-moi! Mais la seule personne qui continuait à me critiquer… c’était moi-même. Je n’aimais pas plus mon corps. Je critiquais chaque partie de mon corps en me regardant dans le miroir : fesses trop petites, seins trop gros et trop pendants, ventre apparent, etc. 

Il y a moins d’un an, j’ai entendu parler de la non-binarité. J’ai donc accepté que c’est correct de ne pas être féminine, et qu’avoir de gros seins, ça ne veut pas dire que je suis « femme ». Je suis juste… moi-même. Je ne suis personne d’autre que ma propre définition de ma personne. L’opinion externe m’importe peu. On s’en fout de ce que les autres pensent!»

 

MJ, 25 ans

 

 

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